Chambre de l’instruction et notification du droit de se taire
Comparution devant la Chambre de l’instruction et droit de se taire
Le droit au silence provient de l’idée que la force ne peut pas contrevenir au droit d’un accusé de refuser de témoigner contre lui-même. Depuis le 15 juin 2000, la loi prévoit ce droit de se taire en matière de garde-à-vue. Le droit au silence est aujourd’hui rappelé à de nombreuses occasions. Le 13 avril 2021, la Cour de cassation a ainsi fait le point sur la notification du droit de se taire en chambre d’instruction. Eclairage avec AKE Avocats.
Demande en liberté, notification du droit de se taire et régularité de la procédure
La législation a connu de nombreux rebondissements au fil des années en matière de détention provisoire. En l’espèce, un demandeur soulevait des moyens visant à contester le refus de sa demande en liberté. Les moyens concernaient la notification du droit de se taire, l’indignité des conditions de détention et les délais imposés à la juridiction pour se prononcer sur sa demande.
Le premier moyen mis en évidence était donc lié à l’obligation de notifier le droit de se taire de la part de la Chambre de l’instruction. Cette obligation se matérialise durant les débats, en l’occurrence pendant l’audience relative à la requête de mise en liberté.
Cette question n’allait pas de soi puisque la Cour de cassation a souvent changé son fusil d’épaule ces dernières années. Au départ, les juges ne souhaitaient pas sanctionner le défaut de notification du droit de se taire lorsque le contentieux en lien avec la détention provisoire ne nécessitait pas l’examen des indices de participation à la commission de l’acte. En 2020, la position des juges a évolué, ces derniers considérant que la juridiction d’instruction devait vérifier que de tels indices existent bel et bien.
Pour la Cour de cassation, le fait de ne pas avoir notifié le droit de se taire n’entraîne pas la nullité de la décision mais l’interdiction formelle de pouvoir utiliser les propos tenus par l’intéressé, exprimés en violation du droit de se taire et de ne pas s’auto-incriminer.
QPC et disposition contraire à la Constitution
La question relative à la notification du droit de se taire n’est pas récente. Elle a d’ailleurs fait l’objet d’une décision du Conseil constitutionnel, rendue le 9 avril 2021 à la suite de 4 questions prioritaires de constitutionnalité.
Par cette décision, le Conseil constitutionnel affirme que l’article 199 du Code de procédure pénale porte atteinte au droit de se taire et qu’il est donc contraire à la Constitution. Rappelons que la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen prévoit bien le droit de ne pas s’accuser soi-même, droit duquel découle le droit au silence. Or, toute personne comparaissant devant les juges de la Chambre de l’Instruction peut être incitée à reconnaître des faits qui l’incriminent. La Chambre a donc la stricte obligation d’informer toute personne mise en examen de son droit de se taire. Si elle ne le fait pas, elle ne pourra pas utiliser les propos et éléments tenus par la personne comparaissant devant elle.
Les effets de cette inconstitutionnalité ont été néanmoins organisés dans le temps, en évitant de provoquer des effets manifestement excessifs au regard du maintien de l’ordre public. Ainsi, toutes les mesures prises avant la décision (donc avant le 9 avril 2021) ne seront pas remises en cause. L’objectif est également d’éviter une imprévisibilité du droit et d’assurer une continuité effective dans la recherche des auteurs d’infractions.
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