Compétence en cas d’enlèvement d’un enfant vers un Etat tiers
Règles de compétence en cas d’enlèvement d’un enfant vers un Etat tiers à l’Union européenne
Dans un arrêt rendu le 24 mars 2021, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) s’oppose à la compétence illimitée de la juridiction d’un Etat membre en cas d’enlèvement d’un enfant vers un Etat tiers, hors de l’Union Européenne. Ainsi, si l’enfant a sa résidence habituelle dans un Etat tiers, il convient de déterminer la compétence de la juridiction en prenant en compte les conventions internationales qui s’appliquent et ce que prévoit le règlement Bruxelles II bis.
Portée territoriale du règlement Bruxelles II bis et responsabilité parentale
L’arrêt rendu par la CJUE pose la question de la portée territoriale du règlement Bruxelles II bis appliquée à la responsabilité parentale. En l’espèce, les parents de l’enfant exercent conjointement la responsabilité parentale et sont de nationalité indienne. Ils possèdent un titre de séjour leur permettant de résider au Royaume-Uni.
En 2017, la mère part avec son enfant en Inde, sans avoir obtenu l’accord du père. En 2019, la mère de famille laisse l’enfant en Inde et repart vivre au Royaume-Uni. Le père saisit alors la juridiction britannique pour demander la garde de sa fille ou, si cela est impossible, un droit de visite.
Ici, le Règlement Bruxelles II bis ne peut pas s’appliquer dans toutes ses dispositions, puisque l’enfant n’a plus sa résidence habituelle au Royaume-Uni. La question concernait en particulier l’article 10 du Règlement, qui a trait au cas de l’enlèvement d’enfant sous certaines conditions.
Maintien de la compétence de la juridiction et non-retour illicite de l’enfant
L’article 10 du Règlement prévoit que le non-retour illicite d’un enfant du fait de son déplacement en-dehors d’un Etat tiers permet de maintenir la compétence de la juridiction au sein de laquelle il avait sa résidence habituelle. En pratique, la juridiction britannique reste compétente tant que l’enfant n’a pas de nouvelle résidence habituelle au sein d’un autre Etat membre. Or, l’enfant possède désormais sa résidence habituelle en Inde, donc hors de l’Union européenne. La juridiction britannique ne peut donc pas intervenir.
La CJUE considère que la compétence de la juridiction saisie est déterminée selon les conventions internationales qui s’appliquent. L’article 10 du Règlement concerne alors uniquement les cas d’enlèvement d’enfant dans le cadre du territoire des Etats membres et non pas d’un Etat tiers.
Arguments justifiant la limite de compétence de la juridiction saisie
La CJUE avance certains arguments pour appuyer sa position :
- L’article 10 du Règlement est une règle spéciale qui vise uniquement les situations d’enlèvement international. Cet article permet de régler le conflit de compétences entre plusieurs juridictions faisant partie d’Etats membres.
- La législation européenne souhaite faire coexister la réglementation de l’Union avec les conventions internationales en matière d’enlèvement d’enfant. Notamment la Convention de La Haye de 1996 et celle de 1980 sur l’enlèvement international d’enfants. Or, l’Inde n’a ratifié aucune Convention de La Haye en pratique.
- Le Règlement a pour objectif de pouvoir répondre à l’intérêt supérieur de l’enfant et de privilégier le critère de proximité territorial. Ainsi, on ne peut pas admettre le maintien d’une compétence illimitée de l’article dans le temps.
Vous vous interrogez sur l’enlèvement d’enfant et le sort de la responsabilité parentale ? Le cabinet Ake Avocats est disponible pour répondre à vos interrogations.