Faute grave et blague sexiste : où s’arrête la liberté d’expression ?
Par un arrêt rendu le 20 avril 2022, la Cour de cassation devait se positionner sur la décision de licencier un animateur de télévision après une blague sexiste banalisant la violence faite aux femmes. La question se posait alors de savoir si cette sanction portait ou pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression dont profite tout salarié. Dans les faits, les juges ont estimé que le licenciement était justifié au regard de la gravité de la faute. Retour sur cette affaire avec Ake Avocats.
Droit à la liberté d’expression pour tous les salariés
En matière de droit du travail le principe est simple. Tous les salariés bénéficient d’une liberté d’expression, qui s’arrête lorsque cela contrevient aux principes de l’entreprise. Cette dernière peut instaurer une charte éthique, dressée de manière proportionnée au but poursuivi. Notamment dans le but de ne pas nuire à sa réputation.
En pratique, il est impossible de sanctionner un salarié pour avoir simplement exprimé ses opinions personnelles. Qu’elles soient religieuses, politiques ou syndicales. Pour autant, un usage abusif de la liberté d’expression peut donner lieu à une procédure disciplinaire voire un licenciement pour faute grave. C’est notamment le cas lorsqu’un salarié tient des propos racistes, diffamatoires ou sexistes. En l’espèce, un humoriste avait tenu des propos sexistes dans une émission diffusée en direct où il était invité. Il avait alors exprimé des propos jugés sexistes qui tendaient à banaliser les violences faites aux femmes. Cela, dans un contexte politique et social déjà très concerné par la protection des femmes victimes de violences domestiques.
Propos sexistes et licenciement : analyse de l’abus de liberté d’expression
Après avoir prononcé ces propos, l’animateur fut licencié par son employeur pour faute grave. Il saisit alors la justice en contestant cette décision. Il précise qu’il n’a commis aucun abus dans sa liberté d’expression. Il avance notamment le fait qu’il s’agissait d’une simple blague. Qui ne contrevenait pas à l’engagement éthique de l’entreprise qui l’emploie.
En analysant le contrat de travail de l’humoriste les juges constatent la présence d’une clause signée par ce dernier, en signe d’accord. La clause prévoyait entre autres le refus de tout propos exposant une personne ou un groupe de personnes au mépris ou à la haine en raison de son sexe. Ou bien encore le refus de propos valorisant l’exercice de la violence, du sexisme ou de tout autre élément de nature à porter atteinte à la dignité humaine. Le contrat prévoyait également qu’une atteinte à ce principe, à l’antenne ou sur un média quelconque, constitue une faute grave permettant à l’employeur de rompre immédiatement le contrat de travail.
Partant de ces différents éléments, les juges ont considéré que l’attitude de l’humoriste à l’antenne constituait un abus à sa liberté d’expression. Cela explique pourquoi le licenciement est fondé, sur la base de la violation d’une clause du contrat de travail, sans que l’on puisse retenir une disproportion par rapport au but poursuivi par l’employeur.
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