
Renforcement de l’ordonnance de protection pour les victimes de violences conjugales
Le 13 juin 2024, la France a franchi une étape significative dans la lutte contre les violences conjugales, marquant un tournant essentiel pour la protection des victimes. Dans la protection des victimes de violences conjugales avec la promulgation de la loi n°2024-536. Cette législation vise à renforcer les dispositifs existants en prolongeant la durée de l’ordonnance de protection à 12 mois et en introduisant une ordonnance provisoire de protection immédiate. Ces mesures répondent à une nécessité pressante d’offrir une protection plus efficace et rapide aux victimes de violences intrafamiliales.
Contexte et enjeux des violences conjugales en France
Les violences conjugales représentent un fléau persistant en France. Selon les données de l’Observatoire national des violences faites aux femmes, en 2022, 240 000 femmes ont été victimes de violences commises par leur partenaire ou ex-partenaire, soit une augmentation de 14 % par rapport à 2021. Face à cette réalité alarmante, les pouvoirs publics ont multiplié les initiatives pour renforcer la protection des victimes et prévenir ces violences.
Renforcement de l’ordonnance de protection : une durée étendue et des mesures élargies
L’ordonnance de protection, instaurée par la loi du 9 juillet 2010, permet au juge aux affaires familiales (JAF) de prendre des mesures urgentes pour protéger les victimes de violences conjugales. Avant la réforme de 2024, cette ordonnance était valable pour une durée maximale de six mois. La nouvelle loi prolonge cette durée à 12 mois, offrant ainsi une protection accrue et continue aux victimes. Cette extension vise à permettre aux personnes concernées de disposer de plus de temps pour se reconstruire et organiser leur vie en toute sécurité.
Outre l’allongement de la durée, la loi introduit des dispositions supplémentaires pour renforcer la protection des victimes :
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Confidentialité de l’adresse : le JAF peut désormais autoriser la victime à dissimuler son adresse, y compris sur les listes électorales, afin de prévenir tout risque de représailles ou de harcèlement de la part de l’agresseur.
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Protection des animaux de compagnie : reconnaissant que les animaux peuvent être utilisés comme moyen de pression ou de chantage, le juge peut attribuer la garde des animaux de compagnie à la victime, assurant ainsi leur protection.
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Clarification sur la cohabitation : la loi précise qu’une ordonnance de protection peut être délivrée même en l’absence de cohabitation entre la victime et l’auteur des violences, élargissant alors le champ d’application de la protection judiciaire.
Introduction de l’ordonnance provisoire de protection immédiate : une réponse rapide au danger
L’une des innovations majeures de la loi de 2024 est la création de l’ordonnance provisoire de protection immédiate (OPPI). Ce dispositif vise à combler le vide juridique entre la demande d’ordonnance de protection et sa délivrance, période durant laquelle la victime peut rester sans protection effective.
L’OPPI permet au JAF de prendre des mesures conservatoires dans un délai de 24 heures à compter de sa saisine. Cela, lorsque des éléments sérieux indiquent la vraisemblance des violences alléguées et un danger grave et immédiat pour la victime ou ses enfants. Cette procédure accélérée est déclenchée par le ministère public, avec l’accord de la personne en danger, garantissant ainsi une réactivité optimale face aux situations critiques.
Les mesures pouvant être ordonnées dans le cadre de l’OPPI incluent :
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Interdiction pour l’auteur présumé des violences d’entrer en contact avec la victime : cette mesure vise à prévenir tout risque de récidive ou de pression sur la victime.
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Interdiction de paraître dans certains lieux : l’agresseur peut se voir interdire l’accès au domicile, au lieu de travail de la victime ou aux établissements scolaires fréquentés par les enfants.
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Suspension du droit de visite et d’hébergement : si le danger est avéré, le JAF peut temporairement suspendre les droits de visite et d’hébergement de l’auteur des violences à l’égard des enfants.
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Interdiction de détenir une arme : compte tenu du risque accru en présence d’armes, le juge peut ordonner la remise de toute arme détenue par l’agresseur aux autorités compétentes.
Ces mesures sont prononcées pour une durée provisoire de six jours, période durant laquelle le JAF doit statuer sur l’ordonnance de protection classique. Cette articulation entre l’OPPI et l’ordonnance de protection assure une continuité dans la protection offerte aux victimes.
Alourdissement des sanctions en cas de violation des ordonnances
La loi de 2024 renforce également le volet répressif en cas de non-respect des mesures imposées par les ordonnances de protection ou les OPPI. Désormais, le fait de ne pas se conformer aux obligations ou interdictions fixées est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende, contre deux ans et 15 000 euros auparavant. Cette augmentation des peines vise à dissuader les auteurs de violences de transgresser les décisions judiciaires et à affirmer la détermination des pouvoirs publics à protéger les victimes.
Si la loi n°2024-536 marque une avancée notable dans la protection des victimes de violences conjugales, sa mise en œuvre effective repose sur plusieurs défis : formation des professionnels, moyens alloués aux tribunaux et suivi des victimes pour assurer leur sécurité et leur reconstruction.
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